Publico aqui uma comunicação de um professor francês sobre a obra de Ribeiro Sanches na Rússia, apresentada na Escola de Estudos Eslavos e da Europa Oriental da Rússia:
"Georges
Dulac
Université
Paul-Valéry Montpellier
POLITIQUE
DE CIVILISATION ET COLONIES EN RUSSIE
D’APRES
LE DR RIBEIRO SANCHES (1765-1766)
0.
Présentation. La création de colonies — au sens d’établissements
territoriaux créés par dês groupes d’hommes venus d’autres pays ou d’autres
régions, à la façon des colonies fondées par les Romains dans les provinces
conquises — est un des éléments du programme de développement de la Russie proposé par Ribeiro
Sanches: il figure dans un des nombreux mémoires manuscrits qu’il envoie à Ivan
Betskoï à partir de 1765, certainement avec l’espoir qu’ils seront lus par l’impératrice.
Cependant il s’agit d’une partie assez peu développée de ce programme très
étendu et complexe qu’il va exposer et étayer de nouveaux arguments jusqu’en 1771,
si l’on en juge par l’ensemble très lacunaire des textes qui nous sont
parvenus: à ses yeux, les colonies constituent dans certains cas, et notamment
dans les régions périphériques de l’empire, un moyen d’accroître l’effet des
mesures fondamentales qu’il préconise pour «civiliser» la Russie, c’est-à-dire pour l’amener
à l’ «état civil» qui a permis aux nations d’Europe occidentales de prospérer
depuis le Moyen Âge. Caractérisé par la liberté personnelle et le droit de
propriété assurés à l’ensemble de la population, cet «état civil», dont la Russie est encore fort
éloignée, suppose un système judiciaire et administratif qui protège l’activité
des classes productives —paysans et artisans — et permet leur enrichissement,
et à partir de là une diversification naturelle des besoins et du travail dans
l’ensemble de la société, jusqu’aux formes les plus évoluées dês activités
artistiques et scientifiques. Ce bref résumé des idées fondamentales de
Sanches, qui sont largement inspirées de Hume et de l’école historique
écossaise, permet d’entrevoir pourquoi la création de colonies ne constitue qu’un
aspect relativement secondaire de ses propositions: je me propose cependant de
montrer qu’il s’agit d’un élément particulièrement significatif, et d’autant
plus peut-être qu’aussi bien Catherine II que certains philosophes comme
Diderot mettent l’accent, à peu près à la même époque, sur le rôle que peuvent
jouer les colonies dans ce qu’on va bientôt appeler la «civilisation de la Russie»[1].
Avant de
poursuivre, il me paraît utile de rappeler brièvement quelques traits de la
personnalité et de la carrière du Dr Ribeiro Sanches (1699-1783) qui ne sont
pas sans importance pour mon sujet, d’autant plus que le personnage reste peu
connu, surtout en France. Ce marrane portugais, qui a quitté définitivement son
pays en 1726 mais a gardé avec lui des relations intellectuelles, et plus tard
politiques, au temps de Pombal, a séjourné dans plusieurs centre intellectuels
européens, notamment Londres, Montpellier, Pise et Leyde, avant d’effectuer une
carrière médicale remarquable en Russie, entre 1731 et 1747: il l’achèvera à la
cour comme médecin de l’impératrice Elisabeth, après avoir exercé plusieurs
hautes fonctions. Dans les années 1730, il a accompagné les armées du maréchal
Münnich comme principal médecin au cours de plusieurs campagnes contre les
Turcs: à ce titre, il a participé à l’incorporation des recrues — trente ans
plus tard, il évoquera encore avec émotion l’atrocité et l’absurdité du système
militaire russe — et a pu d’autre part acquérir une connaissance directe de
plusieurs régions de l’empire. Après avoir quitté la Russie en 1747, il s’installe
à Paris et entretient des relations très actives tant avec dês personnages de l’aristocratie
russe, qu’avec des académiciens de Pétersbourg. En 1762, peu après son
avènement, Catherine II le rétablit dans son titre de membre étranger et
correspondant de l’Académie impériale des sciences, dont il avait été exclu
comme juif, et elle lui accorde une
pension
importante. A partir de 1764, Ivan Betskoï le consulte à propos de la création dês
nouveaux établissements d’éducation et de la réforme du Corps des cadets: ce
sera pour Sanches l’occasion de développer les idées que j’ai évoquées, et de
démontrer l’inutilité pour la
Russie de se doter d’établissements culturels prestigieux et
d’espérer de grand progrès dans les sciences et les beaux arts, en l’absence d’une
«base» sociale et économique. Celle-ci ne pourra selon lui se constituer qu’à
partir du moment où l’on accordera aux paysans le droit de propriété et la possibilite
de s’enrichir, permettant ainsi l’essor du commerce et celui de la population.
A cette époque, et depuis 1760 au moins, Sanches est en relations assez
suivies, semble-t-il, avec le baron d’Holbach et surtout avec Diderot, qui l’engage
à écrire pour l’Encyclopédie et lui communique certains de ses écrits,
comme le montrent les archives personnelles du médecin portugais.
Je me
fonderai principalement sur deux écrits inédits de Sanches, d’importance d’ailleurs
inégale pour mon propos. Le premier est la minute autographe, conservée à
Moscou, d’un mémoire «Sur les beaux-arts»[2] qui traite en réalité, à propos
des conditions nécessaires au développement culturel, de multiples aspects de
la société et de l’économie russes: daté de février 1765, ce texte très riche n’a
jamais été envoyé à Pétersbourg, d’après une apostille de son auteur, mais il a
servi de matrice à d’autres mémoires adressés à Betskoï. Il a d’autre part été
exploité par le prince Dmitri Alexeevitch Golitsyn dans ses lettres sur le
servage[3], dont la série commence quelques mois plus tard. Dans ce mémoire,
Sanches ne parle pas explicitement de colonies à fonder, mais seulement du rôle
que pourraient jouer dans les campagnes, après une réforme du service militaire,
des soldats vétérans qu’on aiderait à s’installer comme colons dans les
campagnes. Le second écrit se présente sous la forme d’une copie d’un «mémoire
XII», daté de juillet 1766, qui a certainement eu le même destinataire que les
autres, auxquels il fait d’ailleurs référence. Intitule «Quelques moyens pour
lier et attacher de plus en plus les provinces conquises à l’Empire de Russie»... dans les Archives du
Ministère des Affaires étrangères[4]: ce qui s’explique aisément puisque
Sanches, en relation avec plusieurs diplomates portugais à l’époque où il
travaillait pour Pombal, leur communiquait certains de ses écrits sur la Russie qui pouvaient des
enseignements utiles concernant les réformes à mener dans cette monarchie qu’il
qualifiait de «gothique». Dans ce mémoire de 79 pages manuscrites, Sanches part
du constat que «les provinces conquises et protégées par l’Empire de Russie»
vivent dans un état de quasi-séparation et sont donc loin de former avec lui
«un seul corps civil et politique», parce qu’à l’exception de Pierre le Grand,
les souverains russes ont négligé de lier les différentes parties de leur État
«par des intérêts aussi avantageux aux vaincus qu’aux conquérants», comme le faisaient
les Romains (Moyens, p. 2). Après avoir analysé les aspects les plus généraux
de cette politique erronée, qui renvoient d’ailleurs aux faiblesses
traditionnelles de l’État et de la société russes, Sanches examine
successivement la situation des provinces baltes, puis de l’Ukraine, enfin des
royaumes de Casan et d’Astrakhan, tout en formulant dans chaque cas les
propositions qui lui paraissent appropriées, parmi lesquelles figurent
plusieurs types de colonies.
Il ne
saurait être question d’analyser ici en détail les vues de Sanches sur les
colonies existantes ou à créer: je voudrais seulement tenter de rendre compte
des rapports dynamiques qui lient les observations sur ce sujet à l’ensemble de
la politique préconisée pour faire progresser la Russie vers «l’état civil»,
autrement dit pour la «civiliser». De ce point de vue, j’avais envisagé primitivement
de comparer les vues de Sanches avec celles de Diderot: sur ce sujet en effet,
le philosophe se fonde sur des principes identiques, et utilise même des
arguments précis tirés de l’état de la société russe qu’il doit probablement au
médecin portugais; mais ce qu’il propose en matière de colonies est apparemment
très différent, ce qui me semble poser un problème intéressant. Cependant je
dispose de trop peu de temps pour tenter cette comparaison, et je me contenterai
de quelques allusions. Je laisserai également de côté un autre rapprochement
qui pourrait s’avérer très significatif avec les écrits de Sanches concernant
les colonies portugaises. À ce propos, je ferai encore une dernière observation
préliminaire, précisément à propos de ce mot colonie: dans le mémoire
que j’ai cité, il est employé au sens que j’ai rappelé, pour désigner un groupe
de colons venus d’ailleurs et l’établissement qu’ils constituent, à la façon
des colonies romaines qui sont la référence constante de notre auteur; c’est
seulement dans ses écrits portugais, que pour parler des territoires conquis,
dominés et exploités outre-mer, et notamment du Brésil, Sanches utilise l’équivalent
du mot colonie, dans ce sens qui est aujourd’hui le plus courant.
Cependant
il arrive que ce dernier sens affleure sous le mot «colon» (désignant un
propriétaire d’esclaves) quand il traite des pays conquis par la Russie depuis Ivan le
Terrible; et c’est même de là qu’il faut partir pour comprendre sa critique
radicale de la politique menée par les souverains russes dans ce domaine..." (continua)
7 comentários:
Interessante, os Países Bálticos e a Ucrânia já naquela época chamavam a atenção dos investigadores europeus.
Gostaria de ler o que o Ribeiro Sanches propunha concretamente para civilizar os territórios recém adquiridos do Báltico, Ucrânia, Kazan, etc.
Também seria interessante ler o que ele dizia acerca do recrutamento militar na Rússia.
Grande piada, os russos a civilizarem o Báltico!!! Ou Ucrânia, tendo em conta que os moscovitas levavam os monges de Kyiv para aprenderem alguma coisa...
Não me parece que os nobres ou camponeses letões fossem propriamente civilizados. Quanto muito, sê-lo-iam os senhores feudais germânicos que dominavam o Báltico mas, claro, todos sabemos em que moldes foram realizadas as suas conquistas e como eles submeteram os povos autóctones...
Quanto aos monges de Kiev, digamos que os seus pupilos ultrapassaram os mestres, eheheh!
Os nobres ou camponeses do Báltico estavam ao nível europeu da época, os nobres ou camponeses russos estavam dois ou três séculos atrás...
Ultrapassaram em que exatamente?... lol lol
Ainda em 1839 o aristocrata francês Astolphe-Louis-Léonor Marquis de Custine, no seu livro “La Russie en 1839”, descreve a Rússia como a antítese histórica e geográfica da Europa, como anti-Europa, onde a vida e o destino dos leigos e do clero, dos senhores e dos cidadãos, depende única e exclusivamente da vontade despótica do seu soberano.
http://www.amazon.com/Russie-en-1839-Astolphe-Custine/dp/0559806639
p.s.
La Russie en 1839, Volume I by marquis de Astolphe Custine
http://www.gutenberg.org/ebooks/25755.bibrec.html
"Ainsi pour ce qui concerne la Livonie et l’Estonie, qui restent étonnamment peu peuplées et dont les «paysans esclaves» sont particulièrement opprimés: Sanches, tout en soulignant les possibilités qu’offrent les régions les plus fertiles, les ports et certaines zones cotières, insiste sur l’accaparement de toutes les sources de richesses par la noblesse balte. Non contente d’exploiter presque toutes les terres (car elle s’empresse de louer ou d’acheter celles que la Couronne a dévolu à des Russes), elle détient le monopole du commerce des marchandises les plus courantes, ce qui lui permet d’exercer une «tyrannie» supplémentaire à l’encontre des paysans."
Ribeiro Sanches
Portanto, como se vê, os camponeses do Báltico estavam ao nível, não dos europeus da época, mas de escravos, a quem a nobreza local "sacava" todas as riquezas.
"La Russie est à peine aujourd'hui à quatre cents ans de l'invasion des barbares; tandis que l'Occident a subi la même crise depuis quatorze siècles: une civilisation de mille ans plus ancienne met une distance incommensurable entre les mœurs des nations."
in Marquês de Custine “La Russie en 1839”
Todos os países têm motivos para serem como são :0)
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